Hier 17 mai 2013, la loi ouvrant le mariage civil et l’adoption aux couples de même sexe a été promulguée.
Ainsi, depuis hier, en France, tout citoyen ou toute citoyenne peut, dès sa majorité, se marier avec un citoyen ou une citoyenne ayant aussi atteint sa majorité.
Ce droit, nous l’avons toutes et tous, quelle que soit notre orientation sexuelle et sentimentale supposée.
De ce fait, non seulement les personnes qui s’identifient comme homosexuelles ou bisexuelles pourront épouser des conjoints du même sexe au même titre que les personnes s’identifiant comme hétérosexuelles épousent des conjoints de sexe différent,
mais personne ne se trouve enfermée dans une quelconque catégorie, qu’il s’agisse d’hétérosexualité, d’homosexualité, de bisexualité ou de tout autre concept déterminant les goûts et les attirances d’une personne.
Ainsi, tout homme tombant amoureux d’un homme et désirant fonder une famille avec lui, toute femme tombant amoureuse d’une femme et souhaitant fonder une famille avec elle, tous pourront le faire, et cela quelle que soit leur histoire personnelle et leurs relations amoureuses et sexuelles passées.
Si vous vous pensez homosexuel-le et que vous souhaiter épouser votre conjoint-e, c’est désormais possible. Si vous tombez amoureux/se de quelqu’un de l’autre sexe, vous pouvez aussi vous marier et avoir des enfants. Réciproquement, si vous vous pensiez hétérosexuel-le et que vous tombez amoureux/se de quelqu’un du même sexe, vos perspectives d’avenir n’en sont pas bouleversées et la légitimité de votre union sera la même aux yeux de la société civile.
Cette loi est un grand progrès pour les droits humains en France. Ce n’est pas tous les jours qu’une loi à la fois aussi simple et aussi puissamment symbolique est adoptée dans notre pays, alors vous me pardonnerez, j’espère, d’élever un peu le ton et d’être solennel et patriotique, pour une fois.
Le débat qui a précédé cette loi a été riche, mais a donné lieu de la part de la frange extrémiste de ses opposants à un déchaînement de violence verbale et physique peu compatible avec les valeurs de notre République. Beaucoup de gens en ont souffert, et je ne parle pas seulement d’homosexuels ou de bisexuels, mais aussi de nombreux citoyens favorables à cette loi d’égalité.
La pire arme de l’intolérance, de l’obscurantisme et de la démesure est sans aucun doute le sillage de consternation et d’effarement dont ils se drapent comme d’un nuage empoisonné face aux gens intellectuellement honnêtes. La Pythie de Delphes, en son temps, disait : rien de trop. Sophocle, dans Œdipe roi, mettait en garde le héros contre l’aveuglement de sa colère par l’intermédiaire du Chœur : « La démesure enfante le tyran ». Des millénaires plus tard, Michel Audiard, dans Les Tontons flingueurs, résume admirablement leur pensée : « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. »
Face aux outrances des réactionnaires extrêmes, face à l’enflure des propos de personnalités politiques irresponsables qui ne sont pas à la hauteur de leurs mandats, il est toujours tentant de céder à l’abattement ou de sombrer dans l’amertume ou le cynisme. Certains, les moins maîtres de leurs passions, cèdent à l’impulsion animale qui consiste à répondre à la violence par la violence et à l’intolérance par l’intolérance, sans se rendre compte qu’en recourant à des procédés pareils pour imposer leurs valeurs, ils les renient eux-mêmes en croyant les défendre.
La meilleure stratégie face aux excès reste la mesure, qui n’est pas la faiblesse. La modération, la persévérance, la discussion argumentée et ferme, le respect des lois et un minimum de réflexion sur les principes qui les fondent, sans oublier la bonne transmission du savoir, voilà ce qui nous fera vaincre les haines et ouvrir les esprits. Dans bien des cas, ce sont les préjugés, l’ignorance ou la paresse intellectuelle qui font le lit de l’intolérance : c’est contre cela qu’il faut lutter, sans jamais réduire la lutte à un affrontement manichéen entre bons et mauvais citoyens. Tout le monde peut comprendre. Avec le temps, j’ai bon espoir que tout le monde comprendra à quel point cette loi est une bonne chose.
Mais avant toute stratégie, ce à quoi il ne faut jamais renoncer, c’est à la confiance et à l’optimisme à propos des Français et de la France. Prendre les gens pour des imbéciles, croire qu’on ne sera pas capable de faire quelque chose, c’est y renoncer avant même d’avoir essayé. On disait il n’y a pas si longtemps qu’impossible n’était pas un mot français. J’aimerais retrouver plus souvent cet état d’esprit dans la société actuelle, au lieu de cette complaisance dans le défaitisme qui ne nous avance à rien et nous entretient dans une mauvaise image de nous-même.
Alors, maintenant que la victoire est là, mettons de côté les péripéties de la lutte, oublions juste un moment tout ce qu’il reste encore à faire, et poussons un cri de joie longtemps attendu, comme l’autre jour dans le XIVe arrondissement à Paris, après l’adoption définitive du texte à l’Assemblée nationale. YA-HOU ! Pas toujours facile quand on a peu d’occasions de yahouter. Refaisons-le : YAHOUUUUUUU !!!
Le fait est là. Nous l’avons fait ! Notre pays, notre peuple en est capable ! Nous pouvons, quand nous le voulons, être fidèles aux grandes valeurs qui ont fait notre fierté dans l’Histoire, et qui la feront encore, si nous nous en donnons les moyens.
Il n’y a pas d’avenir sans vision de l’avenir, sans volonté de construire une République encore plus républicaine et une société meilleure. Les rêves sont les fondations des réalités de demain, et c’est pour cela que nous avons besoin d’oser espérer, d’oser rêver, d’oser même l’utopie, et d’oser agir pour des causes en apparence perdues d’avance. La politique, loin d’être une sorte de jeu creux ou d’éternelle déception d’un « Tous pourris » simplement faux (car les personalités politiques de bonne volonté existent et agissent autant que les autres), est la condition indispensable à la construction de cette société meilleure.
S’en désintéresser, c’est laisser le champ libre aux forces réactionnaires, c’est laisser le terrain aux extrémistes et aux grandes gueules vaines. Et il est hors de question, en ce qui me concerne, que je laisse ce terrain aux réactionnaires, tout comme il est hors de question que je leur laisse le monopole des symboles de la France, du drapeau français, de Marianne, et de cette devise républicaine à laquelle ils ne comprennent rien. La liberté, l’égalité et la fraternité, c’est maintenant, et c’est en agissant maintenant que nous les assurons pour l’avenir.
Alors, j’ai envie de dire : Marions-nous ! Adoptons ! et… faisons encore de la politique !
Vive la République, vive la France, vive nous les Français (un peu d’autocongratulation ne fait pas de mal ^_^) !
Et surtout, vive la cause des droits humains, vive la lutte pour le bien-être de l’humanité !
NOTE : Si vous n’étiez pas passé-e ici depuis un moment, n’oubliez pas de consulter aussi mes annonces d’événements pour la fin mai, à Paris, Strasbourg et Amiens !